Quand je rentre le soir, épuisé par une journée de labeur,
Les rêves secoués dans le ventre, heureux du repos promis,
Je pose ma tête sur l’écorce d’un géant tilleul,
Le genou sur le sol humide, la nuque baissée, et je prie …
Je pense à toutes ces choses que j’ai faites par ferveur,
A tous ces gens que j’ai pris dans mes bras avec envie,
A ces images qui défilent pourtant, s’en va le bonheur
Dit-on, dans les couloirs sombres où tiennent, droites, les bougies.
L’arbre m’écoute et me comprend, je le sens à sa solitude
Qui n’en est pas une, quand il vient dans mes cheveux avec son épée,
Quand il me murmure dans mes hanches, mon front, mes ridules,
Que l’imagination est un paradis qu’il faut cultiver,
Quand il me souffle cela avec une poignée de feuilles désinvoltes,
Quand son silence danse avec de coquines et invisibles senteurs …
Le vent pousse, pousse alors dans ma gorge, je ferme les yeux et vois des cyprès …
A perte de vue, je redécouvre des visages, des corps, des allures à califourchon sur des libellules,
Des poitrines dénudées honorant la chair joyeuse,
Des jambes robustes supportant le poids de la légèreté
Et des cous, des cous torsadés, unis.
Le monde qu’ils habitent maintenant est incongru mais ils ont le sourire.
Les coquelicots craquellent leur bitume, insurgés, ils revendiquent
Le plaisir de la verticalité, le plaisir des écumes.
L’absinthe coule le long du tronc,
Je serre la main sur le bois vert, frère de sève, qui plie sous mon chagrin.
Je t’aime et te vois, te vois et te touche, de la pointe de mon œil,
De mon œil seulement,
Je rêve de ton pouls.
Sous le tilleul, alors, tombe mon deuxième genou.
Prière au bord de terre, des désirs en forme de passerelle,
Des îles, et puis des rivières.
Comment venir jusqu’à toi, moi vivant, et toi, mirage effervescent de ma mémoire ?
Quand je rentre le soir, épuisé par une journée de labeur,
Les rêves secoués dans le ventre, heureux du repos promis,
Je pose ma tête sur l’écorce d’un géant tilleul,
Le genou sur le sol humide, la nuque baissée, et je prie …
A toi, l’absent, qui m’a donné pour héritage
La terre,
Trésor absolu où poussent des promesses,
Des promesses si grandes que pour les arbres
Tous les hommes restent des enfants,
La terre et l’instinct,
Les arbres sentent, parlent comprennent,
Je sais bien.
Je le sens,
Je ressens, ça.
Puis, le temps d’une pause longue, sous une lune affûtée,
Silence en italique, écrirait-on au théâtre,
Je me relève enfin
Contemplant mon immense totem vivant,
Fidèle complice,
Souffleur de songe,
Et lui lance à mon tour une effluve de ma langue …
Il est temps pour moi de reprendre des forces : épouser l’horizon.
Lionel Parrini pour Jeannot Parrini
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